Pourquoi les gaz de schiste doivent-ils demeurer sous terre?
Quand nous étions enfants, nos parents nous encadraient en imposant certaines limites à nos comportements pour notre sécurité et celle de nos camarades de jeu afin que nous apprenions à devenir des adultes responsables. Pareilles limites existent aussi dans le monde en général. Aussi longtemps nous tenons compte de ces limites nous sommes en sécurité, mais si nous les ignorons, nous pouvons nous attirer des difficultés.
Les océans et l’atmosphère dans lequel nous vivons ne peuvent absorber qu’une partie de la pollution créée par les gaz, le pétrole et le charbon que nous consommons. Lorsque le volume des polluants dépasse les limites, ils perturbent notre climat et acidifient les océans. Et cela a déjà commencé.
Ce que l’on appelle les gaz à effet de serre, principalement le carbone et le méthane, s’échappe maintenant en quantité tellement importante que la capacité de l’atmosphère et des océans à les absorber est dépassée. Nous sommes maintenant confrontés aux premières conséquences de notre échec à demeurer à l’intérieur du cadre sécuritaire de nos limites.
Il y a douze ans, le Nouveau-Brunswick avait reconnu ce problème et, avec les provinces et les états frontaliers, s’était engagé à réduire les émissions de gaz à effet de serre à l’intérieur de cibles fixées mutuellement pour 2012, 2020 et 2050. À titre de membre du G-8, le Canada et les autres nations membres s’étaient entendus que les émissions devaient être réduites par 80 % d’ici 2050 afin de prévenir un réchauffement de plus de 2 °C, le point au-delà duquel les conséquences engendrées deviennent sévères.
L’an dernier, l’Agence internationale de l’Énergie (AIE) a déclaré dans son rapport annuel Perspectives énergétiques mondiales que les deux tiers des réserves prouvées de pétrole, de gaz et de charbon devaient demeurer sous terre si nous voulions éviter de pousser la température planétaire au-delà du point critique.
On retrouve aujourd’hui les enfants qui sont devenus dirigeants d’entreprises pétrolières et gazières ou qui sont à la tête de gouvernements qui obtiennent des revenus pour leurs activités, et qui refusent d’accepter que des limites puissent exister. Mais cela va nous causer bien du mal. Ils se comportent comme des invités qui se sont tellement bien amusés qu’ils ne veulent plus partir quand la soirée est terminée. Ils commencent à briser les meubles et à maltraiter leurs hôtes. Vous savez alors que ça va mal tourner.
Tout cela échappe à Stephen Harper et David Alward. Ils doivent être des frères provenant d’une autre planète. Ils insistent pour nous dire que notre avenir dépend du creusage et du pompage de tout bitume, pétrole ou gaz qu’on peut trouver.
Dans le cas du Nouveau-Brunswick, cela veut dire faire la promotion de la fracturation hydraulique des schistes enfouis à des kilomètres sous la surface de la province pour relâcher les gaz naturels qu’ils contiennent, ce qui bien entendu va simplement aggraver nos problèmes.
La fracturation hydraulique pour faire jaillir les gaz de schiste relâche du méthane dans l’atmosphère, tout comme leur pompage dans les gazoducs vers les États-Unis, où ils seront brulés dans les centrales électriques et les usines qui à leur tour émettront encore plus de pollution. Nous ne pouvons pas choisir cette direction.
Lorsqu’on considère la taille du Nouveau-Brunswick, nous contribuons déjà beaucoup plus au problème que plusieurs autres endroits sur la planète. Ce serait irresponsable d’empirer la situation.
Ni le Nouveau-Brunswick ni le Canada n’ont établi de limites légales à la pollution par le carbone et le méthane, car ce faisant nous établirions des limites à la croissance de l’industrie pétrolière et gazière. Une deuxième raffinerie à Saint-Jean serait hors question pour toujours. Les gaz de shale demeureraient profondément enfouis sous le sol. Et il n’y aurait pas de pipeline est-ouest puisque la croissance des sables bitumineux serait réduite.
Pour les politiciens traditionnels, les banquiers et les dirigeants de l’industrie pétrolière, de telles limites sont inconcevables. C’est pourquoi Frank McKenna lorsqu’il a visité le Nouveau-Brunswick il y a quelques semaines a concédé que les changements climatiques étaient un sérieux problème, mais qu’il fallait tout de même exploiter les gaz de schiste. Le problème c’est que nous ne pouvons pas gagner sur les deux tableaux en même temps; même Frank ne peut pas y arriver.
On claironne sur tous les toits que l’exploitation des gaz de shale sera la solution à tous nos problèmes. Laissons les compagnies pétrolières et gazières fracturer autour de toutes nos collectivités rurales et nous obtiendrons de l’argent sans rien en échange. C’est tout simplement un mensonge. Les gens en souffriront et pas simplement ceux qui vivent au Nouveau-Brunswick rural. Ceux qui ne sont pas encore nés, nos futurs enfants, nos petits-enfants trouveront un monde moins hospitalier que celui que nous avons trouvé si nous ne brisons pas notre dépendance économique envers le pétrole et le gaz dès maintenant. Pour certaines personnes sur la planète, leurs maisons deviendront complètement inhabitables.
Il semble presque impossible de ne pas sauter sur le train de la pollution. Je le comprends facilement. Mais il faut résister. Notre mère Nature ne négocie pas. Ses limites sont claires et nous devons nous en souvenir. C’est la raison d’être du Parti vert. Les autres partis ne le comprennent pas.
Partout au Nouveau-Brunswick il existe des personnes qui travaillent à remodeler notre économie pour qu’elle devienne plus localisée, moins dépendante des énergies fossiles et qui servent la communauté dans son ensemble. Ce sont des entreprises petites ou moyennes, des coopératives et des entreprises sociales qui créent des emplois et qui plantent les graines de la révolution de la durabilité dans notre province. À titre de chef du Parti vert, c’est ce que je me consacre à encourager.
David Coon est chef du Parti vert du Nouveau-Brunswick
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